Cet article montre l’influence des paramètres sur le rapport signal sur bruit, ou RSB. Il fait suite à la partie 1 sur les bruits qui traite de l’origine des bruits qui affectent le signal.
Le bruit est un phénomène aléatoire qui vient polluer le signal qui, par sa nature en astrophotographie, est constant. Le critère important est le Rapport du Signal par le Bruit.
La réponse idéale d’un capteur serait que chaque photon reçu soit compté et retourné comme valeur dans le fichier numérique, sans limite. Malheureusement ce n’est pas le cas. Le capteur est limité en partie basse par un niveau de bruit et en partie haute par un seuil de saturation.
La compréhension du comportement des bruits nécessite quelques formules mathématiques. J’en suis vraiment désolé…
Bruit, signal et RSB
Sommaire
Le bruit
Le bruit global N d’une image, est la composition du bruit de photon Np et du bruit de lecture Nr. Comme ces deux bruits sont statistiquement indépendants, ils se combinent de façon quadratique :
Le bruit de photon suit une distribution de Poisson par rapport au signal (les photons) et prend comme valeur :
Où G est le gain d’amplification du capteur, S le nombre de photons reçus par unité de temps et t le temps de pose.
Le bruit de lecture dépend du capteur et de son électronique avant et après amplification du signal. Il est de l’ordre de (c’est un peu plus compliqué avec les amplificateurs à 2 étages). Il ne dépend pas du temps de pose.
Où nr1 est le bruit de lecture avant amplification et Nr2 est le bruit de lecture après amplification.
Le signal
La valeur retournée par le capteur est la résultante du signal capté S (en électrons), du temps de pose t (en secondes) et du gain G (en niveau numérique, noté ADU – analog to digital unit – par électron). La relation est :
Le rapport signal/bruit (ou RSB)
Le rapport du signal sur le bruit est un chiffre important pour analyser les performances d’un capteur et le choix des paramètres de prise de vue. Il s’écrit sous la forme :
Et quand on empile N poses (avec une méthode non additive), il prend la forme :
Le RSB fait intervenir 5 paramètres :
- G, le gain, qui dépend du réglage ISO
- S, le signal, qui dépend de la scène photographiée
- t, le temps de pose
- N, le nombre de poses
- Br, le bruit qui dépend de la technologie du capteur
Le photographe ne maîtrise que les paramètres G, t et N, les deux autres dépendent de la scène photographiée et du matériel utilisé.
Amélioration du RSB
Temps de pose
Si le temps de pose est grand, la composante G.S.t dans la racine sera bien supérieure à la composante du bruit Br2 et le RSB est finalement proportionnel à la racine carrée de t.
Le RSB est doublé quand le temps de pose est quadruplé.
On s’en rend compte dans cette simulation. A gauche une pose de 30 s, dont l’exposition a été corrigée de 2 EV pour correspondre à l’exposition d’une pose 4 fois plus longue de 120 s. On constate que le bruit d’une pose unitaire réduit largement, à exposition égale, quand le temps de pose augmente.
Nombre de poses
Toutes autres choses égales par ailleurs (G, t), l’empilement de N poses augmente le RSB en proportion de la racine carrée de N. C’est la même relation qu’avec le temps de pose.
Le RSB est doublé quand le nombre de poses est quadruplé.
Effet de l’empilement de poses : à gauche 1 pose simple, au centre empilement de 4 poses et à droite de 16 poses.
Il faut trouver le bon compromis, car il est plus simple en termes de temps de calcul et de mémoire de stockage, d’empiler peu de photos avec un long temps de pose, mais il est à contrario plus facile de faire des poses courtes que des poses longues.
Réglage ISO
Le réglage ISO est en relation directe avec le gain G. Multiplier par 2 les ISO (par exemple passer de 400 à 800 ISO), revient à multiplier par 2 le gain G.
Si le terme G.S.t sous la racine de l’expression du RSB est suffisamment élevé par rapport au bruit, le RSB sera proportionnel à la racine carrée du gain G.
Le RSB est doublé quand les ISO sont quadruplés.
Mais le gain influe aussi sur une autre caractéristique importante de la photographie numérique : la dynamique. Augmenter le gain réduit la dynamique.
Dynamique
La dynamique est la capacité à coder des informations.
Elle est notée en bits (1 bit = 2 valeurs possibles, 2 bits = 4 valeurs possibles, 3 bits = 8 valeurs possibles…). Pour une photographie, l’effet le plus visible est la capacité à distinguer des dégradés fins. Plus la dynamique est faible, plus les dégradés seront grossiers :
Son expression mathématique est :
La valeur maximale Smax est définie par la valeur à saturation du capteur.
En théorie, quand le RAW est codé sur n bits, la valeur maximale d’un RAW est donc 2n. Mais en pratique, la saturation est atteinte avant ce maximum. Par exemple sur le Canon 1000D dont les RAW sont codés sur 12 bits, la valeur théorique de 212 = 4096, mais en pratique la saturation pour les poses de plus de 10 s est atteinte à 3652.
De même, en l’absence complet de signal, la valeur d’un RAW peut ne pas être zéro, mais une valeur fixée par le constructeur, appelée le biais (ou offset). Comme on prétraite les photos avant empilement en soustrayant notamment ce qu’on appelle un offset maître, la valeur de saturation résultante est la valeur de saturation de la photo d’origine moins le biais constructeur. Avec le Canon 1000D, cette valeur de biais est de 256, la saturation d’une photo prétraitée est donc Smax = 3652-256 = 3396.
À l’autre extrême, le bruit Br correspond à la valeur minimale Smin.
On a donc :
Le gain n’apparaît pas dans cette formule. Il faut regarder en détail le bruit Br. On a vu au début de l’article que le bruit était la somme quadratique d’un bruit avant amplification (amplifié par le gain) et d’un bruit après amplification (non amplifié) :
Quand le gain est assez grand, ce qui est le cas en astrophoto où on pose souvent à 800 ISO ou plus, le premier terme est supérieur au second et le bruit Br se réduit à G.br1. On a alors l’expression de la dynamique :
Quand on double les ISO, on perd environ 1 bit de dynamique.
Conclusion
Pour augmenter le rapport signal sur bruit, le photographe dispose de 3 leviers :
- Augmenter le temps de pose
- Augmenter les ISO
- Augmenter le nombre de poses
Il faut donc trouver un compromis.
Une règle simple est de déterminer le temps de pose de façon à ce que le signal mesuré dans une zone fond de ciel sans étoiles ni nébulosités (après retrait du dark), soit entre 3 et 4 fois supérieur au bruit mesuré sur un offset.
On jouera sur le temps de pose et le réglage ISO, sans toutefois sortir de la « bonne » plage ISO du capteur (entre 800 et 3200 ISO selon les boitiers).
Quand le ciel est très noir ou qu’on utilise un filtre à bande étroite, cette méthode retourne souvent des temps de pose très longs, de 10, 20 voire 30 minutes, tout à fait inconcevables pour les moyens des astronomes amateurs lambda. Il faudra alors faire au mieux !